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Abattement applicable aux gains de cession de titres de PME

CE, 26 avril 2024, n° 453014 : le Conseil d’Etat juge que pour un couple marié sous le régime de la communauté universelle, les conditions prévues par ce dispositif s’apprécient isolément pour chaque conjoint

L’article 150-0 D ter du CGI a institué un abattement sur les plus-values de cession de valeurs mobilières en faveur des dirigeants de PME qui cèdent leurs titres au moment de leur départ à la retraite. Cet abattement d’un tiers par année de détention des titres au-delà de la cinquième année entraînait l’exonération totale d’imposition de la plus-value pour les titres détenus depuis plus de huit ans. Pour bénéficier de ce régime, le cédant devait satisfaire plusieurs conditions tenant à l’exercice de fonctions de direction dans les cinq ans précédant la cession, la détention pendant la même période d’au moins 25 % des droits de vote ou des droits en capital et l’obligation de cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession.

Le Conseil d’Etat a déjà eu l’occasion de préciser que pour un couple marié sous le régime de la communauté légale le respect des conditions du droit à l’abattement relatives à la personne du cédant s’apprécie au niveau de chaque conjoint pris isolément et non au niveau du foyer fiscal (CE 10 décembre 2014 n° 371437 M. et Mme Chavanel). Par conséquent, n’ont d’incidence sur cette appréciation individuelle du respect des conditions de l’abattement par chaque époux ni la circonstance qu’ils font l’objet d’une imposition commune, ni le fait d’être mariés sous le régime de la communauté légale. 

Par une décision n° 453014 du 26 avril 2024, le Conseil d’Etat vient de préciser, dans le prolongement de cette jurisprudence, que des contribuables désirant bénéficier de l’abattement prévu à l’article 150-0 D ter du CGI ne peuvent pas davantage se prévaloir de la communauté universelle pour faire bénéficier de l’abattement l’ensemble des actions cédées, y compris la part indivise de l’un des époux qui ne satisfait pas à la condition de départ à la retraite dans les deux ans précédant ou suivant la cession des titres.

Nota : La rubrique “En pratique” est conçue pour permettre aux professionnels de la fiscalité d’appréhender rapidement les conséquences pratiques d’un texte afin d’en faciliter la lecture et la mémorisation. De par sa nature, le contenu de cette rubrique peut être réducteur. De plus, elle est rédigée en simultané avec le texte principal et n’est pas mise à jour en fonction de l’évolution des textes, ni de leur interprétation par la jurisprudence ou la doctrine.

Compte tenu de la sensibilité, de la variété des situations, des enjeux et de l’évolution constante de la matière fiscale, il est recommandé aux non-spécialistes de consulter un professionnel, le plus souvent un avocat fiscaliste, pour assurer la sécurité juridique de leurs opérations. La rédaction décline toute responsabilité quant à l’application des mesures présentées dans la rubrique “En pratique”.

(…) 4. Le 1 du I de l’article 150‑0 A du code général des impôts dispose que : « (…) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux (…) de valeurs mobilières, de droits sociaux (…) sont soumis à l’impôt sur le revenu (…) ». Aux termes du 1 de l’article 150‑0 D du même code, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige : « 1. Les gains nets mentionnés au I de l’article 150‑0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d’acquisition par celui‑ci ou, en cas d’acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. (…) ». Aux termes de l’article 150‑0 D bis, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 : « I. ‑ 1. Les gains nets mentionnés au 1 de l’article 150‑0 D et déterminés dans les conditions du même article retirés des cessions à titre onéreux d’actions, de parts de sociétés (…) sont réduits d’un abattement d’un tiers pour chaque année de détention au‑delà de la cinquième (…) ». L’article 150‑0 D ter du même code, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige, dispose que : « I. ‑ L’abattement prévu à l’article 150‑0 D bis dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 s’applique dans les mêmes conditions (…) aux gains nets réalisés lors de la cession à titre onéreux d’actions, de parts ou de droits démembrés portant sur ces actions ou part, acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2006, si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La cession porte sur l’intégralité des actions, parts ou droits détenus par le cédant dans la société dont les titres ou droits sont cédés ou sur plus de 50 % des droits de vote ou, en cas de la seule détention de l’usufruit, sur plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux de cette société ; 2° Le cédant doit : / a) Avoir exercé au sein de la société dont les titres ou droits sont cédés, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession et dans les conditions prévues au 1° de l’article 885 O bis, l’une des fonctions mentionnées à ce même 1° ; (…) / b) Avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l’intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et sœurs, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ; / c) Cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession (…) ».

3. Il résulte des dispositions citées ci-dessus qui, compte-tenu de leur caractère dérogatoire, doivent être interprétées strictement, que le bénéfice de l’abattement prévu à l’article 150-0 D ter du code général des impôts est subordonné au respect de plusieurs conditions relatives à la personne du cédant, tenant notamment à l’exercice effectif de fonctions de direction normalement rémunérées au sein de la société dont les titres sont cédés et à la cessation de toute fonction au sein de cette même société dans les deux années suivant ou précédant la cession. Par suite, le respect de ces conditions s’apprécie nécessairement, dans le cas d’un couple marié, au niveau de chaque conjoint pris isolément. Si les dispositions du 1 de l’article 6 du code général des impôts soumettent les personnes mariées à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d’elles, cette règle n’implique pas, par elle-même, d’apprécier au niveau du foyer fiscal le respect des conditions d’éligibilité à l’abattement pour durée de détention applicable aux cessions réalisées par les dirigeants de sociétés lors de leur départ en retraite. Enfin la circonstance que les époux sont mariés sous le régime de la communauté, qu’il s’agisse de la communauté légale ou de la communauté universelle, est sans incidence sur l’appréciation individuelle que requiert l’application des dispositions fiscales en cause. 

(Annulation de l’arrêt attaqué).











(…)





 

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