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Titres de participation : précisions inédites du Conseil d’Etat

CE, 11 juin 2024, n° 470721, société Agapes : le Conseil d’Etat apporte deux précisions nouvelles concernant la notion de titres de participation et les conditions de déduction des moins-values sur ces titres.

En l’espèce, à l’issue d’une vérification de comptabilité, l’administration avait remis en cause la déduction d’une fraction de moins-values à court terme constatées par une société à l’occasion de l’absorption de sa filiale et de la dissolution d’une autre filiale, qu’elle avait recapitalisées.

L’administration avait fondé ce redressement sur une clause anti-optimisation propre aux moins-values sur titres de participation, introduite par une loi de finances rectificative pour 2012, selon laquelle : « La moins-value résultant de la cession, moins de deux ans après leur émission, de titres de participation acquis en contrepartie d’un apport réalisé et dont la valeur réelle à la date de leur émission est inférieure à leur valeur d’inscription en comptabilité n’est pas déductible, dans la limite du montant résultant de la différence entre la valeur d’inscription en comptabilité desdits titres et leur valeur réelle à la date de leur émission » (CGI, art. 39 quaterdecies, 2 bis).Le premier point en litige portait sur l’interprétation de la notion de « cession » mentionnée par cette disposition.

Le Conseil d’Etat valide la position de l’administration : il juge que l’annulation de titres détenus par une société à la suite d’une opération de restructuration entraînant la transmission universelle à son profit du patrimoine de la société dont les titres sont annulés doit être regardée comme présentant le caractère d’une cession au sens et pour l’application des dispositions du 2 bis de l’article 39 quaterdecies du CGI.

La seconde question à trancher était plus fondamentale puisqu’elle touchait à la définition même des titres de participation et à sa distinction par rapport aux titres de placement.

le Conseil d’Etat valide la qualification de titres de participation retenue par l’administration.

Il rappelle d’abord que, sur le plan comptable, les titres de participation sont ceux dont la possession durable est estimée utile à l’activité de l’entreprise, notamment parce qu’elle permet d’exercer une influence sur la société émettrice des titres ou d’en assurer le contrôle. Il ajoute que revêtent le caractère de titres de participation, comme l’a au relevé l’Autorité des normes comptables, les titres qu’une société mère souscrit dans le cadre de la recapitalisation de sa filiale suivie, à court terme, de la dissolution de celle-ci avec transmission universelle de son patrimoine à sa mère, dès lors que cette opération conduit la société détentrice des titres à exercer un contrôle direct des actifs et des passifs de la société dont les titres ont été annulés.

Nota : La rubrique “En pratique” est conçue pour permettre aux professionnels de la fiscalité d’appréhender rapidement les conséquences pratiques d’un texte afin d’en faciliter la lecture et la mémorisation. De par sa nature, le contenu de cette rubrique peut être réducteur. De plus, elle est rédigée en simultané avec le texte principal et n’est pas mise à jour en fonction de l’évolution des textes, ni de leur interprétation par la jurisprudence ou la doctrine.

Compte tenu de la sensibilité, de la variété des situations, des enjeux et de l’évolution constante de la matière fiscale, il est recommandé aux non-spécialistes de consulter un professionnel, le plus souvent un avocat fiscaliste, pour assurer la sécurité juridique de leurs opérations. La rédaction décline toute responsabilité quant à l’application des mesures présentées dans la rubrique “En pratique”.

(…)

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’à l’issue d’une vérification de comptabilité de la société Flunch, l’administration fiscale a remis en cause, en application du 2 bis de l’article 39 quaterdecies du code général des impôts, la déduction du résultat fiscal déclaré au titre de l’exercice clos en 2015 d’une fraction des moins-values à court terme constatées à l’occasion de l’absorption de sa filiale, la société Flunch 7 Est, et de la dissolution d’une autre filiale, la société Flunch Polska SP, qu’elle avait recapitalisées en 2013. Par un jugement du 30 juillet 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de la société Agapes, société tête du groupe fiscalement intégré auquel appartient la société Flunch, tendant au rétablissement de son déficit reportable déclaré au titre de l’exercice clos en 2015, réduit en conséquence de la rectification du résultat de la société Flunch. La société Agapes se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 23 novembre 2022 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a rejeté l’appel qu’elle avait formé contre ce jugement.

2. Aux termes du 2 bis de l’article 39 quaterdecies du code général des impôts :  » La moins-value résultant de la cession, moins de deux ans après leur émission, de titres de participation acquis en contrepartie d’un apport réalisé et dont la valeur réelle à la date de leur émission est inférieure à leur valeur d’inscription en comptabilité n’est pas déductible, dans la limite du montant résultant de la différence entre la valeur d’inscription en comptabilité desdits titres et leur valeur réelle à la date de leur émission « .

3. En premier lieu, en jugeant que l’annulation de titres détenus par une société à la suite d’une opération de restructuration entraînant la transmission universelle à son profit du patrimoine de la société dont les titres sont annulés devait être regardée comme présentant le caractère d’une cession au sens et pour l’application des dispositions du 2 bis de l’article 39 quaterdecies du code général des impôts, la cour n’a pas commis d’erreur de droit.

4. En second lieu, sur le plan comptable, les titres de participation sont ceux dont la possession durable est estimée utile à l’activité de l’entreprise, notamment parce qu’elle permet d’exercer une influence sur la société émettrice des titres ou d’en assurer le contrôle. Revêtent ce caractère, comme l’a au demeurant relevé l’Autorité des normes comptables dans ses observations présentées à la demande du Conseil d’Etat, les titres qu’une société mère souscrit dans le cadre de la recapitalisation de sa filiale suivie, à court terme, de la dissolution de celle-ci avec transmission universelle de son patrimoine à sa mère, dès lors que cette opération conduit la société détentrice des titres à exercer un contrôle direct des actifs et des passifs de la société dont les titres ont été annulés.

5. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 qu’après avoir relevé, par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation, qu’à la date de la souscription des titres émis en 2013 par ses filiales, les sociétés Flunch 7 Est et Flunch Polska SP, en contrepartie d’augmentations de capital, la société Flunch entendait conserver le contrôle de ces deux sociétés, fût-ce au travers de leur dissolution avec transmission de leur patrimoine à son profit, la cour a pu, sans commettre d’erreur de droit ni inexactement qualifier les faits qui lui étaient soumis, juger que ces titres avaient le caractère de titres de participation.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque.

(…)




















 

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