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Nouvel arrêt de la CJUE le secret de l’avocat en matière fiscale

CJUE, 29 juillet 2024, Keva et a. : En déclarant contraire au traité une nouvelle discrimination en matière de fiscalité des dividendes, la Cour réaffirme avec force le principe de liberté de circulation des capitaux et sa ligne stricte quant aux motifs de nature à justifier une restriction à cette liberté.

CJUE, 26 septembre 2024, Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, C-432/23 : la Cour de justice apporte de nouvelles précisions sur la conciliation entre le secret professionnel de l’avocat et les obligations déclaratives résultant de la directive « DAC ».

Après plusieurs arrêts importants rendus sur des questions préjudicielles belges, c’est cette fois une question préjudicielle luxembourgeoise qui conduit la Cour, à nouveau, à confronter la directive DAC avec les exigences posées par la Charte des droits fondamentaux de l’UE. Plusieurs questions différentes étaient posées par la Cour administrative du Luxembourg.

En premier lieu, la Cour confirme que la protection des communications entre un avocat et son client, garantie par l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE, a un champ large : elle s’applique non seulement aux documents contentieux, mais aussi aux consultations juridiques de l’avocat, quel que soit le domaine du droit sur lequel elle porte (par exemple, en l’espèce, en matière de droit des sociétés).

Dès lors, une décision enjoignant à un avocat de fournir à l’administration l’ensemble de la documentation et des informations relatives à ses relations avec son client, afférentes à une telle consultation, constitue une ingérence dans le droit au respect des communications entre un avocat et son client, garanti par la Charte.

En deuxième lieu, la Cour était saisie d’une nouvelle contestation de la validité de la directive DAC, en ce qu’elle ne limiterait pas suffisamment l’ingérence qui résulte de ses dispositions dans le droit au respect des correspondances des avocats. Cette contestation portait spécifiquement sur l’échange d’informations sur demande d’un Etat membre. La Cour juge que, même si la directive ne comporte pas de dispositions relatives à la protection de la confidentialité des communications entre un avocat et son client dans le cadre de la collecte d’informations qui incombe à l’État membre requis, ceci n’implique pas que cette directive méconnaisse la Charte. En effet, c’est à chaque État membre qu’il incombe de garantir, dans le cadre des procédures nationales mises en œuvre aux fins de cette collecte, la protection des communications entre un avocat et son client. Ainsi, elle précise que chaque État membre doit, notamment, veiller à ce que toute éventuelle limitation de l’exercice des droits garantis par la Charte soit « prévue par la loi », au sens de son article 52.

Enfin et surtout, la Cour juge qu’une règlementation nationale qui rend le secret de l’avocat inopposable s’agissant de l’ensemble des consultations prodiguées en matière fiscale est contraire au droit de l’UE. En l’espèce, sur le fondement de la loi luxembourgeoise, une injonction avait été émise par l’administration fiscale à l’encontre d’un avocat, afin qu’il produise la documentation relative à ses relations avec son client, afférente notamment à la mise en place de certaines sociétés d’investissement. L’avocat s’y était opposé au motif que la communication de ces éléments violerait le secret professionnel auquel il est astreint. La Cour juge que l’article 7 et l’article 52, paragraphe 1, de la Charte s’opposent à une telle injonction, fondée sur une réglementation nationale en vertu de laquelle le conseil et la représentation par un avocat dans le domaine fiscal ne bénéficient pas, sauf en cas de risque de poursuites pénales pour le client, de la protection des communications entre un avocat et son client.

Nota : La rubrique “En pratique” est conçue pour permettre aux professionnels de la fiscalité d’appréhender rapidement les conséquences pratiques d’un texte afin d’en faciliter la lecture et la mémorisation. De par sa nature, le contenu de cette rubrique peut être réducteur. De plus, elle est rédigée en simultané avec le texte principal et n’est pas mise à jour en fonction de l’évolution des textes, ni de leur interprétation par la jurisprudence ou la doctrine.

Compte tenu de la sensibilité, de la variété des situations, des enjeux et de l’évolution constante de la matière fiscale, il est recommandé aux non-spécialistes de consulter un professionnel, le plus souvent un avocat fiscaliste, pour assurer la sécurité juridique de leurs opérations. La rédaction décline toute responsabilité quant à l’application des mesures présentées dans la rubrique “En pratique”.

 

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