En pratique
Une notification de rehaussement à une société d’un groupe intégré, ne permet pas à une autre société du groupe de bénéficier du délai spécial de réclamation attaché à une procédure de vérification.
On sait qu’aux termes de l’article R. 196-3 du LPF, un contribuable qui a fait l’objet d’une procédure de reprise ou de rectification de la part de l’administration fiscale dispose d’un délai égal à celui de l’administration pour présenter ses propres réclamations. Pour ce qui est de l’impôt sur les sociétés, le délai spécial de réclamation ainsi ouvert par l’intervention de l’administration expire, aux termes de l’article L. 169 du LPF, le 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la notification de proposition de rectification est intervenue.
Dans l’affaire soumise au Conseil d’Etat se posait la question de savoir comment ces dispositions peuvent se combiner avec celles des articles 223 A et suivants du CGI, relatives au régime fiscal des sociétés fiscalement intégrées. En effet, la société HSBC PLC Bank, qui se trouve à la tête d’un groupe fiscalement intégré a saisi l’occasion d’un redressement notifié par l’administration à l’une des sociétés membres de ce groupe pour tenter d’obtenir par voie de réclamation la restitution de la fraction d’impôt sur les sociétés correspondant à une erreur qu’elle a commise dans la détermination de crédits d’impôts étrangers imputables sur l’IS en France. Le Tribunal administratif de Montreuil puis la cour administrative de Paris ont successivement rejeté cette demande.
En combinant les dispositions des articles L. 169 et L. 189 du LPF et 223 A du code général des impôts, le Conseil d’Etat juge que la notification régulière à une société membre d’un groupe fiscalement intégré des rehaussements apportés à son bénéfice imposable interrompt la prescription à l’égard de la société mère, en tant que redevable de l’impôt sur les sociétés dû sur le résultat d’ensemble du groupe, pour les seules impositions correspondant au résultat individuel de la société membre du groupe ayant fait l’objet d’une procédure de reprise.
Il en déduit que, dans une telle hypothèse, la société mère, en tant que redevable de l’impôt sur les sociétés de l’ensemble du groupe fiscalement intégré, ne peut se prévaloir du délai spécial de réclamation prévu à l’article R. 196-3 du LPF pour solliciter la correction de cet impôt d’ensemble à raison de la correction d’éléments concourant à sa détermination, propres à l’activité ou aux résultats de sociétés membres de ce groupe autres que la société ayant fait l’objet de la procédure de vérification et de rectification. Il en va notamment ainsi lorsque la correction demandée porte sur la détermination du montant des crédits d’impôts, attachés aux produits reçus ou dépenses exposées par ces autres sociétés, imputables, en application de l’article 223 O du CGI, sur le montant de l’impôt d’ensemble dont la société mère est redevable.
Par voie de conséquence, la réclamation introduite en 2017 par la société requérante à raison de la proposition de rectification notifiée à l’une de ses filiales en 2014 a été regardée comme tardive, dès lors qu’elle ne tendait pas à la correction du résultat individuel de cette dernière, mais de celui de l’ensemble du groupe, qui ne pouvait plus être contesté en se prévalant du délai spécial prévu à l’article R. 196-3 du LPF.
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(…) 2. D’une part, aux termes de l’article R. 196-3 du livre des procédures fiscales : » Dans le cas où un contribuable fait l’objet d’une procédure de reprise ou de rectification de la part de l’administration des impôts, il dispose d’un délai égal à celui de l’administration pour présenter ses propres réclamations. « . Aux termes de l’article L. 169 du même livre : » Pour l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l’administration des impôts s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due (…) « . Aux termes du premier alinéa de l’article L. 189 du même livre : » La prescription est interrompue par la notification d’une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d’un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun (…) « . Il résulte de ces dispositions qu’un contribuable qui a fait l’objet d’une procédure de reprise ou de rectification dispose, pour présenter ses propres réclamations, d’un délai égal à celui fixé à l’administration pour établir l’impôt, lequel expire, s’agissant de l’impôt sur les sociétés, le 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la proposition de rectification lui a été régulièrement notifiée.
3. D’autre part, en vertu de l’article 223 A du code général des impôts, si la société mère d’un groupe fiscalement intégré peut se constituer seule redevable de l’impôt sur les sociétés dû sur le résultat d’ensemble déterminé par la somme algébrique des résultats des sociétés du groupe, celles-ci restent soumises à l’obligation de déclarer leurs résultats et c’est avec ces dernières que l’administration fiscale mène les procédures de vérification de comptabilité et de rectification, dans les conditions prévues aux articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. Il résulte de ces dispositions, combinées avec celles des articles L. 169 et L. 189 de ce livre, que la notification régulière à une société membre d’un groupe fiscalement intégré des rehaussements apportés à son bénéfice imposable interrompt la prescription à l’égard de la société mère, en tant que redevable de l’impôt sur les sociétés dû sur le résultat d’ensemble du groupe, pour les seules impositions correspondant au résultat individuel de la société membre du groupe ayant fait l’objet d’une procédure de reprise.
4. Dans une telle hypothèse, la société mère, en tant que redevable de l’impôt sur les sociétés de l’ensemble du groupe fiscalement intégré, ne peut se prévaloir du délai spécial de réclamation prévu à l’article R. 196-3 du livre des procédures fiscales pour solliciter la correction de cet impôt d’ensemble à raison de la correction d’éléments concourant à sa détermination, propres à l’activité ou aux résultats de sociétés membres de ce groupe autres que la société ayant fait l’objet de la procédure de vérification et de rectification. Il en va notamment ainsi lorsque la correction demandée porte sur la détermination du montant des crédits d’impôts, attachés aux produits reçus ou dépenses exposées par ces autres sociétés, imputables, en application de l’article 223 O du code général des impôts, sur le montant de l’impôt d’ensemble dont la société mère est redevable.
5. Pour juger tardive la réclamation présentée le 25 octobre 2017 par la société HSBC Bank PLC – Paris Branch, tendant à la restitution d’une fraction des cotisations primitives d’impôt sur les sociétés qu’elle avait acquittées au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2010, la cour administrative d’appel de Paris s’est fondée sur ce que la proposition de rectification notifiée le 22 avril 2014 à sa filiale, la société HSBC France, portant uniquement sur le résultat individuel de cette dernière, ne lui ouvrait pas, en application de l’article R. 196-3 du livre des procédures fiscales, un nouveau délai pour demander la correction du montant, imputable sur le résultat d’ensemble du groupe, des crédits d’impôt forfaitaires attachés aux redevances de source chinoise perçues par vingt-trois autres de ses filiales. En statuant ainsi, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, n’a pas commis d’erreur de droit. Par suite, la société HSBC Bank PLC – Paris Branch n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque (…) ».
(Rejet).
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